mercredi 22 avril 2009

La nage papillon dans ma chambre


Il y a deux jours je vous parlais d'accessibilité aux études. Les événements font que je n'ai pas le choix d'en parler encore aujourd'hui. En fait, j'ai décidé cette année que je ne travaillerais pas cet été. Ça doit être l'air de la France (ici travail et études ne se conjuguent pas, en tout cas, pas à Sciences Po). Prendre un été "off". Me gâter. Mais, c'était un peu risqué. Je contracterais une espèce de dette sur l'avenir. Car, ma bourse de Sciences Po ne couvre évidemment pas les mois d'été. Et je dois faire un aller-retour vers le Québec, me nourrir, etc. C'était une "wild-card". Car, depuis le mythique été de mes 14 ans où je vendais des macarons du festival d'été (à l'époque à 8$) je n'ai pas trop chômé pendant la belle saison. Cet été là j'ai fait 800$ en 10 jours. J'étais millionnaire. Faut dire que j'avais travaillé pour à peu près 2$ de l'heure pendant 3 semaines avant aussi (On était payé à commission, 80 cenne du macaron. La belle époque). Mais j'aime mieux faire le calcul juste sur 10 jours. L'été de mes 15 ans je suis allé en France avec l'école. Je n'ai pas travaillé donc. Et puis, le Capitole, les Six-Associés et le Festival d'été, le Capitole (prise II) ET les Six-Associés (burnout anticipé), creuser des trous pour Agriculture Canada, le Regroupement des Comités Logements, Molson et l'été dernier Molson (prise II), un groupe communautaire de Montréal et un contrat de traduction pour McGill.


Au moins, y'a eu de la diversité.

Pendant ce temps je me suis ramassé un peu de sous pour me taper le voyage avec Rémi et Danielle que vous avez suivi l'an dernier. Et bien, j'ai le plaisir de m'annoncer que cet été j'emmène Antoine à la poursuite des cowboys de l'Ouest canadien et américain. Ensuite, j'ai la ferme conviction de me prélasser sur les terrasses, devenir le king de la pétanque de la Petite-Patrie et aller m'empiffrer de homard en Acadie. Car, contre toutes attentes, j'ai reçu une bourse de maîtrise du Fonds de Recherche sur la Culture et la Société. Un bon montant disons. Même en euros, ça fait encore un bon montant. Je dis contre toutes attentes parce que l'an dernier j'avais appliqué et j'avais des attentes. Le 22 avril (même date) j'ai lu fébrilement le email de l'organisation gouvernementale. J'ai été débiné pendant un bout. J'avais confiance en mon dossier. Je suis arrivé 9e sur 12. Ils prenaient les 3 premiers. Même pas proche. Un peu comme Canadien contre Boston.

Cette année je reçois le email du comité. Là, je l'ouvre en me disant: "Maudit, j'avais pourtant une belle journée. Il fait soleil, j'ai gagné mon match de pétanque quotidien". Et là, mes yeux ne voyaient même pas clairs. Je cherchais la phrase désastreuse, la pogne. Parce que la semaine passé je me suis fais avoir comme jamais.

J'ai appliqué pour la bourse Max Lazard visant à aider un étudiant de Sciences Po à réaliser un voyage à l'étranger. Mon projet consistait (consistera?) à aller en Algérie pour étudier comment un syndicat algérien tente de s'inspirer du Fonds de solidarité de la FTQ. Comme la proposition des héritiers de Max Lazard mentionnait que le type en question avait consacré sa vie à la lutte contre le chômage je me disais que mes chances étaient bonnes. On me téléphone. La madame du service des bourses me fait comprendre que "Votre proposition a beaucoup impressionné le comité" et ensuite me rappelle pour être certaine du titre de mon projet. J'avais l'impression qu'elle avait besoin de plus de détail pour écrire le communiqué annonçant ma grande victoire. Je suis invité à une entrevue et ensuite à un coquetèle.

Ce genre d'événement me rend nerveux. En fait, je ne sais pas comment m'habiller. J'ai pas vraiment de linge "chic" et j'ai l'impression d'être endimanché si j'essaie de bien m'habiller (se référer à mon déguisement de Mormon lors de ma graduation de McGill...)

Là je me suis bien habillé. Chemise noire, veston (!!!) noir, souliers carrés. Je vais au cocktail et là le responsable de la Fondation annonce aux différents demandeurs de bourse que les projets sont tous intéressants. Que l'on est des gens motivés. Et blablabla. Il tourne autour du pot. Finalement, il conclut: "Cette année nous avons décidé de ne pas attribuer la bourse Max Lazard." QUOI??? Vous nous avez fait venir ici mais surtout fait repasser ma chemise pour rien. Je suis reparti complètement dégoûté du monde des intellectuels. Ces intellectuels qui reçoivent 23 propositions et qui n'en choisissent aucune. Et là je me suis rappelé cette fameuse chanson de René Binamé, tiré d'un poème de Charles d'Avray:

"C’est reculer que d’être stationnaire
On le devient de trop philosopher".

Je suis donc officiellement payé pour étudier. Et pour faire de la recherche. Faire de la philosophie si on veut. Mais c'est promis, je ne vais pas trop philosopher.

En apprenant la nouvelle de la bourse j'étais tellement excité que mes bras se sont mis à faire pleins de gestes et je sautais sur place. J'en ai déduit que je nageais dans ma chambre.

Sinon, pour vous prouver que la pétanque c'est du sérieux, voici un tableau que notre coach nous a fait étudier aujourd'hui. Vous en comprendrez que la distance c'est x, k est une constante, Vo la vitesse initiale et alpha l'angle par rapport au sol.

Ça y est, cet été je deviens la terreur des boules. Je joins la fédération québécoise de pétanque. Ce qui me motive? "Bénéficier d'une assurance accident". Évidemment.

Didier Choupay, une légende de la pétanque, a mystifié la formule balistique. Sa technique est inimitable. Un jour elle sera mienne. Ô oui, un jour, elle sera mienne.

Cliquez ici pour continuer à lire

lundi 20 avril 2009

Liberté, Égalité et Séparés



Voilà quelques semaines que je n'ai rien écris sur ce blog. Voyez-vous, j'étais encore sur ma baloune technologique. Non, sérieusement, je savais que j'allais à Londres bientôt et je voulais attendre quelques jours pour écrire un message sur mon expérience là-bas.

La semaine dernière j'avais une espèce de "semaine de lecture". En gros, une semaine de relâche mais question qu'on culpabilise on l'appelle "semaine de lecture". J'ai quand même lu beaucoup mais pas exactement sur ce que je "devrais". Et Londres? Pas mal mais rien à se jeter à terre. J'y étais juste 4 jours, c'est sûr. Mais la ville m'a semblé incroyablement désertée par les jeunes, les marginaux. En fait, par un peu n'importe qui qui ne porte pas a)un costume-cravate, b)un coupe-vent jaune fluo, c)un habit traditionnel d'un pays asiatique ou du Moyen-Orient.

L'Angleterre est un bien drôle de pays. Et quoi qu'en disent mes autres amies bloggueuses, je ne suis pas près à dire que les Québécois nous sommes Anglo-saxons.

Il y a maintenant 5 ans j'ai choisi d'aller étudier à McGill. En fait, j'y suis allé pour différentes raisons. Premièrement, je souhaitais étudier. Me concentrer d'une certaine manière sur mes études. Avoir accès à une bibliothèque irréprochable. Être entouré d'étudiants motivés et d'une gang de bons profs. Étudiants motivés? Bons profs? Pas tout le temps. Ils sont pas toujours motivés mais en tout cas ils sont vaniteux. Prenez un groupe facebook "au hasard". Il se nomme "Why Yes, I Do Go To The Best School in The Country". Il compte 3422 membres. Ça donne une idée.

Mais une des raisons pourquoi j'ai choisi McGill c'était pour me confronter à quelque chose de nouveau et de terrifiant: le Canada Anglais.

J'ai été servi. Sans m'attarder sur la mode exécrable des Ontariennes en coton ouatés ni sur le délicieux et ô combien irrévérencieux concept du Freshman 15, mes 2 années à McGill ont été riches en chocs culturels.

Penchons-nous sur un de ceux les plus significatifs à mon avis. Après la grève étudiante pour les prêts et bourses, une (petite) vague de Francophones s'est joint à la "scène" militante McGillienne. Car il y a beau y avoir quelque chose comme 6000 francophones à l'université, il y en a maximum 15 d'impliqués dans QUOI QUE CE SOIT. Le fait que l'association étudiante ait fermée le seul groupe dédié aux Francophones n'aide sûrement pas. Donc, comme vous le savez, depuis le Cégep je me suis impliqué dans les associations étudiantes et autres groupes pour défendre l'accessibilité aux études. C'est une question de principes mais aussi de nécessité. L'accessibilité selon moi c'est d'abord les frais de scolarité les plus bas possibles, un programme de bourses généreux et accessible à la majorité des étudiants, des loyers décents et pas trop chers, un système de transport efficace. Mais c'est aussi des garderies pour les enfants des étudiants et étudiantes, des bâtiments accessibles aux handicapés, un campus sans tireur fou ou prédateurs sexuels, des horaires convenables, des outils informatiques fonctionnels et faciles.

Or, dans les groupes militants de McGill l'accessibilité c'est ça mais aussi d'autres choses qui me laissent perplexes. Car, lors de ma première année un dossier occupait le "mouvement étudiant" de McGill. Un dossier que ces militants associaient à l'accessibilité: l'octroi, par l'Université, d'une salle de prière pour les Musulmans.

Un des piliers de l'Islam est la prière, qui doit être fait 5 fois par jour.
De fait, les Juifs se sont payés leurs locaux près du campus. Les Catholiques aussi. Des Évangeliques aussi. Mais pas les Musulmans. Sur toute cette question, l'administration de l'Université s'est démarquée par son improvisation et ses contradictions. On accorde un local de prière. On le retire. On envoie les Musulmans prier dans une cage d'escalier, etc. On déclare l'Université laïque, on met les drapeaux en berne quand meure le Pape...

Vous voyez le genre. Mais, pour moi, et l'autre francophone qui était là lors de la réunion, cela ne veut pas dire que le mouvement étudiant doit appuyer la revendication des Musulmans. Certes, le climat ambiant est complètement islamophobe. Il suffit de prendre ce taré de Martineau. Mais ce n'est, à mon avis, pas une raison d'abandonner une revendication séculaire du mouvement étudiant, des institutions publiques laïques.


Et là, incompréhension totale avec les Anglos. Rien à faire. C'est dur de trouver un compromis: on appuie oui ou non. Résultat: on a compris qu'on est pas Anglo-saxons. Vous voyez le genre de fossé. Je parlerai pas de deux solitudes parce que j'ai hâte de rejoindre ma solitude albertaine restée à Montréal. Avec qui je suis profondément en désaccord sur cette question. C'est la vie.

Tout ça pour dire que Londres c'est pas Paris. Premièrement, Paris est vraiment, vraiment plus belle. Deuxièmement, la France est un pays probablement plus hypocrite que l'Angleterre. L'idéal français c'est la Patrie universelle, la Patrie des droits humains où il n'y a aucune différence de couleur, de religion. Nous sommes tous des citoyens. Liberté, Égalité, Fraternité et blablabla. À la première occasion on ferme la porte à la Turquie de l'Union européenne (ils sont vraiment trop différents de "Nous" ces Turcs). Et je parle même pas du racisme ordinaire. Un autre pays.

Même si j'étais pas trop dépaysé en me promenant dans le Mile-End londonien ou dans son Parc Victoria, Londres est un autre monde. Ses quartiers ethniques sont charmants mais un peu troublants. Je crains que ce ne soit une sorte de "Separate but equal". En voyant des femmes musulmanes voilées intégralement avec un niqab je me suis senti drôlement loin de la France. Et encore plus de Québec.

Photos:
-Vous êtes pas capables de lire le panneau de la première photo. Moi non plus. C'est dans une langue indienne.
-Un magasin de Whitechapel.
-Votre serviteur sur la tombe de Marx.

P.S. J'aurais pu écrire un message super enthousiaste sur les pubs anglais et la "real ale". Je ne le ferai pas.
P.P.S. Gabrielle faut pas que tu penses que j'ai pas aimé mon séjour. C'était génial quand même.

Cliquez ici pour continuer à lire