lundi 25 mai 2009

Les promoteurs me répondent...

Je vous parlais de revitalisation. Quelques articles de votre côté de l'Atlantique me font écho.

Et pour citer les promoteurs de GM Développement: « On va peut-être se faire lancer des tomates, mais ils sont tous dans le quartier : les danseuses, les femmes violées, les seringues (Point de repère), Rendez-vous centre-ville, Lauberivière, soupire Mme Marcon. On nous demande de faire de la mixité, mais ce n’est plus de la mixité, s’il y a trop d’organismes communautaires, ça devient des ghettos. C’est toujours le social contre les gros méchants promoteurs. »

La suite dans le fabuleux Journal de Québec où une série d'articles sur le quartier donne une bonne idée des "développeurs". Quelques belles citations:

"Le couple Campeau-Marcon (GM Développement) parle de Saint-Roch comme s’il s’agissait de leur bébé."
"Ça prendrait au minimum 1 000 unités de condos de plus pour augmenter le nombre de résidants ayant un pouvoir d’achat intéressant".

L'article a au moins le mérite de rappeler qu'au cours des 15 dernières années 415 millions de dollars ont été investis mais que le revenu moyen des ménages est de 26 959 $ soit la moitié de la moyenne de la ville de Québec...

Il est passé où cet argent?



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jeudi 14 mai 2009

Le Grand Pari: Bruxelles, Montréal, Québec


Vous en avez peut-être entendu parler, le Grand Pari. Mister Sarkozy a convié une dizaine d'architectes et d'urbanistes "de classe mondiale" pour imaginer un Paris différent, un Paris de l'an 2030. En fait, cela a touché une corde sensible chez moi, comme chez beaucoup de monde. Québec est ma ville. Je l'aime. Profondément. Montréal, mon lieu de résidence. Je commence à l'aimer. Bruxelles... Au moins y'a de la bière.

Si ce n'étais pas clair avant: je suis urbain. Un de mes bons amis, Beaudet, vient de déménager à Bécancour. Il s'est trouvé une job à St-Léonard d'Aston. 3 lignes sur wikipédia. Courage Beaudet. Je sais que c'est ça que tu souhaitais mais personnellement, je ne peux me résoudre à déménager dans une telle campagne. En fait, je pense que, dans mon for intérieur, j'aimerais venir d'un trou. Un St-Élie de Caxton, les Îles-de-la-Madeleine ou Harrington Harbour. Mais c'est un fantasme. Non, je ne déménagerai pas là. C'est comme venir de la Nouvelle-Orléans. On en rêve tous secrètement. Mais jamais on y déménagera. Trop chaud. Trop... Je sais pas. Pas assez aussi.

Un peu comme Naples aussi. On peut souhaiter en être originaire. En fait, on ne veut pas y vivre, on veut être Napolitain. Aussi bien dire que c'est impossible. Et c'est correct comme ça.

Mais, justement, c'est ce qui fait que l'on devrait se préoccuper à changer, à améliorer d'où on vient. Commençons par Paris.

Les plans des amis de Sarko sont sympathiques. On parle de verdure, de jardins sur les toits, de transports efficaces, de commerces de quartier. En fait, ça a bonne presse de donner des millions à des visionnaires et de critiquer les "locaux" qui souhaitent de la verdure, des jardins sur les toits, des transports efficaces, des commerces de quartier d'"immobilisme" mais pour tu-suite. Je vous le demande: y a t'il déjà eu un concept aussi sournois et vide de sens que celui d'immobilisme?

Au Québec il est de bon ton de critiquer ceux qui ne veulent pas d'une ville vivante en 2030 mais plutôt maintenant. Il y a une paranoïa à propos du Plateau-Mont-Royal. À en croire certaines lignes ouvertes ou journalistes patentés, le Plateau serait une espèce de grande loge de la franc-maçonnerie où se déciderait l'avenir du monde et le génocide des banlieusards.

J'ai ma petite idée là-dessus. En fait, j'ai travaillé pendant 2 étés pour des groupes communautaires de ce quartier. Y a t'il des riches sur le Plateau? Certainement. Sont-ils majoritaires. Non. Le quartier est un des plus pauvres du Québec. Statistiques à l'appui.

L'équivalent de Québec du Plateau serait peut-être un hybride entre St-Jean-Baptiste et St-Roch. Le site web QuébecUrbain est un trésor pour les amoureux de l'urbanisme et de l'architecture de Québec.
Et dès qu'il y ait question de St-Jean-Baptiste, une horde d'internautes, méprisant à qui mieux-mieux les habitants du quartier, ne jurent que par la hauteur. À les écouter il faudrait construire une Tour Montparnasse à l'îlot Berthelot. Exit le logement et la vie de quartier. En fait, le discours est particulièrement hypocrite. On dit d'un côté: il est irrationnel de construire du logement social (des coopératives) dans un endroit aussi central. De l'autre on dit qu'il faut éviter de faire des ghettos de pauvres. Donc, pas de ghettos de pauvres au centre-ville. Mais à Bardy là c'est pas grave. C'est l'inverse du pas dans ma cour. C'est pas dans mon centre-ville.

Connaissez-vous le Village de l'Anse? Un immense complexe d'habitation pour pauvres. 400 logements. La dernière fois que j'y suis allé c'était pour assister à une méga-bataille à genre 50 contre 50. La police a débarqué illico (ça fait pas loin de Victoria...) C'est une cité à l'image des cités françaises. Emmurée, complètement artificielle, éminemment multi-ethnique. On y vit pas pire qu'ailleurs mais les dangereux visionnaires qui l'ont créé n'y vivent certainement pas.

Car ce qui fait la vie de quartiers comme St-Jean-Baptiste où St-Roch ce ne sont pas les grandes firmes de haute-technologie attirées par les congés de taxes à répétition, ni les parcs construits à coup de millions de dollars et où la police débarque quand on se trempe les orteils dans la fontaine. C'est la diversité du tissu urbain. Ben oui, il y a des punks, des prostituées et des mendiants. Ben oui, c'est ça une ville.

Car dans toutes ces revitalisations, de St-Roch à Pointe-St-Charles, à quoi redonnent t'on la vie? En fait, la question est fausse. Ce qu'on a reproché à St-Roch ce n'était pas seulement la fermeture de dizaines de commerce mais le fait que le quartier était bien vivant. Ça dérangeait. Revitaliser a voulu dire chasser. À quoi bon créer des emplois si c'est pour en exclure les résidents? La madame qui parlait à ses souliers dans le mail St-Roch elle a tu trouvé une job à Ubisoft? Non. Elle a été forcé de déménager. Ailleurs. Dans St-Sauveur, Limoilou, Charlesbourg, Beauport.

À mon avis, la rue St-Joseph est plus terrifiante maintenant qu'il y a 10 ans. Ok, en 1999, il fallait craindre le Chinois qui marchait avec une canne et la tête vraiment croche. Ou bien, on regardait le monsieur qui a une malformation géante du nez et on se trouvait chanceux d'être nous-même aussi beaux et en santé. Maintenant, après 17h la rue est déserte. Avant il y avait de l'animation 24h.

C'est pas pour idéaliser le passé. Il y avait des problèmes dans St-Roch. Comme il y en a dans St-Jean-Baptiste ou à Pointe-St-Charles. Des problèmes de pauvreté, de logement, de chômage, d'exclusion, d'analphabétisme. Quand la nouvelle chocolaterie fancy de la rue St-Joseph fait une campagne pour faire fermer la soupe populaire évangélique de la rue du Pont c'est parce qu'on est passé à côté de la track pas à peu près.

Sur Québec Urbain on se plait aussi à casser du sucre sur le dos du comité populaire St-Jean-Baptiste. C'est quand même une organisation unique, qui a su survivre depuis plus de 30 ans. Et qu'est-ce qu'on reproche au compop? D'avoir créé la Fête du Faubourg? Une joujouthèque où l'on peut emprunter des jouets? De faire la promotion du logement social où se côtoient résidents pauvres et moins pauvres et commerces de proximité. Ou bien de souhaiter une "rue partagée" où piétons, cyclistes et automobilistes cohabitent. Ha bon! Une rue partagée. Exactement les plans futuristes de l'Anglais Richard Rogers invité par Sarko.

C'est bon avoir des projets osés, innovateurs. Est-il nécessaire de demander à des experts? Comme dirait Renaud:

"Tes H.L.M. sophistiqués. On n'en veut pas nous nos maisons. On s'les construira nous même. Sur les ruines de tes illusions."

Ou bien pour citer un autre chanteur populaire: "Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l'œil de ton frère et n'aperçois-tu pas la poutre qui est dans ton œil à toi !"

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dimanche 3 mai 2009

Pendant ce temps là au Sri Lanka


Au cas où vous ne le saviez pas, le 1er mai est, depuis plus d'un siècle la Journée internationale des travailleurs et travailleuses. C'est une grande célébration de ceux qui travaillent (en opposition à ceux que la Bourse engraisse sur le travail des autres). Même si la date du 1er mai fait référence à un événement aux États-Unis, honnêtement, quand je suis allé fêter le Premier mai à New-York l'an dernier c'était plutôt triste. En fait, la tradition s'est perdue aux États-Unis où pratiquement seuls les immigrants mexicains et équatoriens sortent dans la rue. À Montréal elle vivote selon l'humeur des syndicats. Ce n'est pourtant pas un hasard si lorsque le salaire minimum augmente cela se fait le 1er mai...

Mais en France par-exemple!

En fait, le 1er mai c'est vraiment un rituel. À tous les sens du terme. Premièrement, en me rendant à la grande manifestation avec des amies italiennes (avec qui j'avais été au Premier mai italien il y a 7 ans!) on passe acheter de quoi manger et boire. Et là on réalise que partout dans la rue il y a des gens qui vendent des fleurs. Du muguet. Pourquoi? En 1941, Pétain rend le 1er mai férié. Curieux. Mais il remplace la fleur d'églantine, associée à la gauche, par le muguet. Les pauvres et les syndicats du début du siècle ont le droit de se financer en vendant du muguet, le 1er mai seulement. Alors encore aujourd'hui tout le monde vend du muguet.

Ensuite on arrive au point de rassemblement place Denfert-Rochereau. Beaucoup de monde. Ce qui retient surtout l'attention c'est une musique ATROCE jouée beaucoup trop fort et à laquelle une dizaine d'iraniens communistes font de la danse en ligne.

Au cours de la journée il y eut quelques curiosités.

-Le cortège des nerds.
L'État français est présentement en train de voter une loi (appelée loi hadopi) qui serre la vis au partage de fichier, à l'informatique libre, etc. Donc, derrière une bannière, une centaine d'hommes blancs à lunettes et avec des pinchs, chemises mangas détachées sur un t-shirt avec une blague incompréhensible à ceux étrangers à la culture des hackers. Quand même rafraîchissant de voir que ce genre de public, normalement enfermé devant un écran d'ordinateur, considère pertinent de se mêler aux sans-papiers et aux ouvriers.

-La direction sanitaire de la région Seine-St-Denis affiliée à la CGT.
Il y a des centaines, voire des milliers de syndicats avec des camions qui vendent du rhum (!!!) et font jouer de la musique. Quelle musique? Ce camion jouait la chanson "La manifestation" des Cowboys Fringants. Bizarre. De fait, il y a eu un beau soleil toute la journée (fériée) de vendredi.

-Mais surtout, les Tigres tamouls. Je ne connais à peu près rien sur les Tamouls. Ce que j'en sais maintenant c'est que c'est un peuple hindouiste en Inde et au Sri-Lanka qui revendique son autonomie de l'État Sri-lankais officiellement bouddhistes. Il y a une guerre civile depuis plus de 35 ans. En fait, je sais que les Tigres tamouls sont une organisation dite terroriste selon l'Union européenne et le Canada.

À Paris, il y a une importante communauté tamoule dans le 18e arrondissement. En fait, ce qui étonne dans ce quartier c'est non seulement les commerces avec des affiches en faveur des Tigres tamouls mais aussi le quartier général des Hells Angels parisiens dont vous voyez la photo. Drôle de ville.

Au Premier mai il n'y avait pas de Hells mais des Tamouls ça il y en avait en masse. La semaine dernière plus de 200 tamouls ont été arrêtés et une centaine d'autres placés en "garde à vue" lors d'une manifestation qui s'est conclue par des affrontements avec la police. En fait, tout ça est vraiment étrange. En France il y a bien des affrontements entre des jeunes dits issus de l'immigration mais pas avec des Tamouls.

Et au Premier mai il y avait facilement 5000 tamouls marchant ensembles avec des milliers de drapeaux des Tigres et portant souvent des t-shirts de l'organisation révolutionnaire et des portraits des commandants militaires du groupe. Ça semblait vraiment très bien organisé.

Le plus troublant dans tout ça ce n'était pas le nombre (quoiqu'incroyable) mais les slogans. Des centaines de jeunes filles qui s'expriment dans un français parfait et qui scandent "Médias français, parlez de nous" a quelque chose de spécial. Plus de 1500 morts en quelques semaines et pas une nouvelle qui filtre. Car au delà de la légitimité des Tigres (qui ont peut-être plus à voir avec leurs voisins motards que ne l'admettraient les participants à la manifestation) c'est l'hypocrisie des puissances occidentales qui est soulignée. Dans ce cortège, des dizaines de pancartes avec une question: "Vous avez aidé le Kosovo, pourquoi pas nous?"

On a pas le temps d'y penser, il faut paranoier sur la grippe porcine.

Photo: Le drapeau des Tigres tamouls flottant au-dessus du lion de Denfert. (Toute la faune y était).
Le QG des Hells.

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