mercredi 23 janvier 2008

Des germes et des Incas



Il y a de ces questions qui vous permettent de cerner les gens. Une bonne,reprise dans Pulp Fiction: Il y a deux types de personnes, les personnes Elvis et les personnes Beatles. Qui êtes-vous? Je suis évidemment Elvis.
Une variante que Rémi m'a enseignée. Deux types de personnes. Les lecteurs de Tolstoy et ceux de Dostoïevski. Comme ni l'un ni l'autre n'avons lu les deux le mystère demeure entier.

Mais je propose une nouvelle version de la question. Il y a les fans des Mayas et les adorateurs des Incas. Je crois me rapprocher des derniers.

Car hier nous sommes allés à Machu Picchu, nouvellement sacrée "merveille du monde" dans un controversé sondage sur internet. La ville Inca ne laisse effectivement personne indifférent. De l'ampleur des constructions, à la situation géographique complètement démente, les ruines sont à couper le souffle. Nous nous y sommes rendus grâce à une marche de 4 jours dans les montagnes en empruntant ledit "chemin des Incas".

J'ai eu la chance d'en apprendre sur la civilisation Inca il y a 2 ans, lors de mon séjour en Équateur. Mais plus j'en sais et plus je souhaite en apprendre.

La veille de notre entrée triomphale à Machu Picchu, trempé jusqu'aux os après 3 jours de pluie, nous avons visité le site de Wiñaywaina. On comprend des dizaines rangées de galeries que le site servait de laboratoire pour acclimater différentes espèces de plantes. Des expérimentations agricoles. De quoi rendre jaloux mes anciens collègues d'Agriculture Canada qui travaillent sur le maïs, les patates. Des cultures des Incas...

Mes comme pour les Aztèques, parmi les récits les plus intéressants que nous avons sur les Incas, ce sont les Conquistadors qui les ont écrits. Car lorsque Pizarro arriva au Pérou en 1531, les Incas étaient déjà affaiblis et en guerre civile. Le roi Inca Huayna Capac meurt en 1527, 4 ans avant que Pizarro n'arrive sur le territoire inca. Il meut à 34 ans. Pourquoi? Ses fils se déchirent sur la succésion. Les Espagnols n'en feront qu'une bouchée.

Huayna Capac meurt à cause des Espagnols mais avant les Espagnols... En fait il meurt de la variole qui se propagea plus vite que les conquérants. Et c'est à ce titre que je vous invite à lire un livre passionnant: De l'inégalité parmi les sociétés - Essai sur l'homme et l'environnement dans l'histoire de Jared Diamond.

La traduction du titre en français est un échec lamentable. Le titre original en anglais se lit comme : "Des armes, des germes et de l'acier". Un livre accessible qui répond à de nombreuses questions sur l'évolution des sociétés humaines. Un livre imparfait mais vraiment intéressant.

Quant à moi je devrais partir dans la prochaine semaine vers le lac Titicaca et la Bolivie...

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mardi 15 janvier 2008

Et il a plu dans le désert


Hé bien, il fallait que je parle de drogue pour que les messages se multiplient sur ce blog... En fait, pour vous rassurer je n'ai pas eu trop d'effet à long terme de l'ayahuasca si ce n'est un sens de l'odorat particulièrement aigusé. Pas vraiment agréable dans certains contextes.


Depuis l'aventure amazonienne Rémi et moi avons pris l'avion (oui, oui, pour la première fois...) vers Lima où nous a rejoint Danielita. Et de là on a commencé notre petit bout de chemin vers Cuzco où nous nous trouvons présentement. Or, entre Lima et Cuzco nous avons été témoin de deux phénomènes naturels étranges. Premièrement nous sommes allé dans la petite ville de Pisco, berceau de la boisson du même nom. Mais Pisco n'existe plus. Ou presque. La ville a été vraiment secouée par un tremblement de terre en août dernier. Vous voyez donc le avant et après de la cathédrale locale. La chute de la cathédrale seulement aurait fait environ 200 morts.

Mais Pisco, tout comme Ica, qui héberge un oasis assez près du mirage, se trouvent dans des déserts. Et il a fallu que nous soyons dans le désert pour qu'il se mette à pleuvoir. Fait inusité. Et la pluie, en plus d'inonder le dortoir de Rémi a mis le feu à la facade de la rotisserie où nous mangions quelques secondes plus tôt.

Et maintenant, question de vous tenir à jour, notre belle bande de lurons au nombre de 3 est maintenant à Cuzco, cité-puma des Incas où nous devrions visiter le Machu Pichu (quelques jours après la visite de Jenna Bush, fille de l'autre, qui est ici aujourd'hui).

Et ensuite? Les plus fidels à ce blog auront noté que l'itinéraire sur la carte que je vous présentais il y a maintenant près de 4 mois et demie a été complété. Danielle et moi poursuivrons en duo dans les prochains mois. Vers où? Nous attendons des suggestions. Nous désirons nous installer, être un peu sédentaire. Argentina? Uruguay? On vous tiendra au courant.

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samedi 5 janvier 2008

Dans le prochain épisode: Philippe expérimente la drogue

Apparemment les voyages forment la jeunesse. Et comme le but de plusieurs routards est de mieux se connaître soi-même le message suivant porte sur le monde merveilleux des drogues.

Vous me connaissez. Je ne prends pas de drogue. J'ai connu les effets du cannabis pour la première fois je devais avoir 19 ans. Soit environ 5 ans après tous mes amis. Je n'étais tout simplement pas attiré par la drogue. Et, à titre d'anecdote, non seulement je peux compter sur une main les fois où j'ai été sous l'effet de drogue mais la dernière fois que j'ai fumé du pot a été plutôt étrange. Un ami, Jesse "Jewish like me" m'invite à "inaugurer" sa nouvelle pipe. Hé ben, une inauguration de pipe. Je ne comprends pas. Mais comme la maladresse de Jesse n'a d'égal que son grand coeur, j'accède à la demande, pour lui faire plaisir. Je me suis donc retrouvé évaché sur un divan en train de regarder un des pires match Canadiens-Buffalo de l'histoire en me demandant: "Mais pourquoi est-ce que les Sabres ont échangé Grant Fuhr, mais pourquoi donc?"

Et hormis ces quelques essais avec le cannabis, jamais de trucs chimiques, que ce soit des pilules, de la cocaïne ou des champignons. J'ai entendu parler de drogues pour étudier mais je ne bois même pas de café...

Mais qui dit Amazonie dit chaman...

Voici donc, dans l'ordre, mes tentatives de la semaine dernière.

-Une espèce de tabac râpé qui se sniffe. Je comprends toujours pas l'effet ou l'utilité.
-Une goutte de tabac sur la langue. Même chose que le précédent.
-Ensuite, une sorte de poudre de coca mélangé avec quelque chose comme des cendres. Les autochtones que nous avons rencontrés aux 3 frontières gardait une immense quantité de cette poudre dans leurs joues, ce qui faisait des nuages de poudre verte quand ils parlent. Le guide nous dit que ça lui coupe l'appétit et que ça donne de l´énergie. Pourtant, à part une légère sensation dans une joue je n'ai rien senti. J'ai mangé avec appétit et baillé. Ça marche pas cette affaire là.

-Et là on passe aux choses sérieuses. L'ayahuasca.

Ok, j'ai toujours détesté écouter les gens parler de leur expérience de drogue mais là comme c'est ma seule je n'ai pas le choix de vous entretenir là-dessus. D'autant plus que j'entre dans la légende en ayant fait une drogue que même le mythique Tak n'a pas fait...

L'ayahuasca est une liane de l'Amazonie qui, mélangée avec une autre plante, un espèce d'arbuste, et préparée en potion est un puissant hallucinogène. Le Rough Guide, un guide de voyage, avertit que c'est beaucoup plus puissant que le LSD.

C'est donc dans un trou perdu de la jungle, à environ 150 km de Iquitos (la plus grande ville au monde sans accès terrestre) que Rémi et moi avons fait la connaissance de Madame Ayahuasca et de Juan, notre chaman et ami devant l'Éternel.

L'ayahuasca est préparée par les chamans pour avoir des visions dans un esprit curatif et mystique. Je raconte un peu la cérémonie. À 20h30 précises Rémi et moi allons dans une pièce de ce camp de jungle. Dans la pièce se trouve 2 coussins, un tas de bottes de caoutchouc et Juan, le chaman. Il nous explique la plante et nous avertit: "Chacun a sa chaudière personnelle". Je savais déjà que la prise de l'ayahuasca faisait vomir...

Je commence. Juan me sert un verre de cette potion rougeâtre. Les chandelles éclairent la pièce. Je fait un toast et je cale. Ensuite je dois me gargariser avec un liquide transparent complètement dégueulasse et cracher dans la chaudière, vierge jusqu'à ce moment. L'ayahuasca comme telle a un goût amer. Pas si pire que ça mais drôlement tenace. Rémi m'imite et le chaman se sert un petit verre, le quart de notre ration. Il nous demande de garder le silence et de nous concentrer pendant 15 minutes.

Je me croise les jambes et essaie de respirer profondément, de relaxer. Le temps passe. Probablement plus de 15 minutes. J'ai la sensation d'être en train de me balancer tranquilement. Mon cerveau, le personnage principal de la soirée, se demande: "Hé ben, peut-être que ça commence à faire effet." Quelques minutes plus tard je me couche sur le coussin. Et là "On roule à Monaco".

Je commence à voir des espèces d'étoiles mauves. Correct. Mon estomac commence à pas trop feelé mais c'est pas si pire. Environ 30 minutes plus tard, j'entend Rémi commencer le long et pénible emplissage de sa chaudière. Et là je commence à m'inquiéter. Par souci de clarté on appellera ici "Cerveau" la partie lucide de mon esprit et "Conscience" la partie qui capote complètement.

"Cerveau" dit: "Ouin, faudrait peut-être que je vomisse moi aussi. Je voudrais pas garder l'ayahuasca trop longtemps dans mon corps et faire une over-dose." "Conscience" répond: "As tu vu le poisson? Pareil comme ceux que l'on a vu en apnée au Panama." "Cerveau se tait et regarde Conscience regarder le poisson.

Juan demande: "Tout va bien?". Ma bouche fait un espèce de son incompréhensible. Ça veut dire oui. Le chaman comprend. Il a l'expérience, c'est un chaman. Pendant ce temps il agite une branche avec des feuilles. Ça fait l'effet d'un stroboscope dans ma tête. Tout clignote. C'est plutôt agréable. Ensuite il sifflera et chantera une espèce de berceuse.

Environ une demie-heure plus tard le ventre n'en peut plus. Je vomit énergiquement. Je cherche frénétiquement ma chaudière. Mon corps se bat. Il veut se vomir lui-même. J'ai des hauts-le-coeur tellement violents j'ai l'impression que c'est l'intestin au complet qui va sortir par la gorge. Je me recouche.

Et l'autre côté du tube digestif se manifeste. Cerveau se dit: "Ouin, faudrait penser aller aux toilettes." Conscience répond: "T'es malade. C'est physiquement impossible et de toute façon comment on dit "Cross-check" en français?" Cerveau a oublié. Il se tait.

C'est le début d'une guerre féroce entre le Cerveau et le tube digestif. Car tous les muscles de mon corps sont complètement paralysés. Je ne suis pas couché, je suis dans le coussin. Mieux, je suis le coussin. Lever un bras serait comme lever 500 lbs.

Au bout d'un moment je n'en peux plus. Je gromelle quelque chose. Le guide qui assiste à la cérémonie me prend par la taille et me traîne tranquillement aux bécosses. Et là, j'hallucine complètement. La lumière est instable. Je ne suis pas capable de marcher. Je m'arrête à chaque 3 pas pour cracher. Conscience hallucine complètement. Et elle entraîne tout le reste du corps. Sauf Cerveau qui voit tout aller, complètement lucide. Il se dit: "Voyons, c'est pas compliqué marcher. Un pas devant l'autre. On doit vraiment faire pitié à voir." Après la petite demie-heure aux toilettes, le guide me ramène à la cérémonie. Et la pendant que Cerveau prend des notes mentales de ce qui se passe Conscience se déchaîne. Elle voit des milliers d'images. Comme des diapositives qui tourneraient super rapidement pendant des heures. Et des images sans aucun lien entre elles. Mais toutes concrètes. Un poisson, Albert Einstein, quelqu'un qui donne du sang, une guitare en feu, la tour Eiffel, un magasin IKEA, ma prof de 2ième année, un chameau. Et ça continue. Je vois mon ami Javier dans un écran d'ordinateur et une image qui approche. "Voulez-vous aller aux toilettes?" Cliquer sur Oui ou Non. Je veux faire Cancel mais je ne peux pas. L'image s'aggrandit et se raproche.

Tout ça pendant des heures. À minuit Juan nous indique l'heure et nous dit que nous devrions aller dans nos lits, que nous ne serons plus malades. Le guide déplace Rémi. Je fais un dernier petit vomit pour remercier le chaman et lui montrer mon appréciation. Je rentre me coucher.

Impossible de dormir. Mon cerveau est trop actif. Vers 6h30 je me léverai finalement, encore étourdi. Je vais me laver dans la rivière. Je me porte mieux. Je suis reposé. Je souris.

C'était l'ayahuasca. Une bonne expérience que je ne referrai jamais de toute ma vie. Car l'ayahuasca ne m'a rien enseigné. Elle m'a seulement montré que je me connaissais déjà assez bien.

Je ne suis pas fait pour la drogue. En fait c'est plutôt le contraire. La drogue n'est pas fait pour moi.

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